Le délai de saisine de la commission départementale de conciliation pour la fixation du prix du bail renouvelé

La 3ème chambre civile de la Cour de cassation a rendu le 7 mars 2012 (n° de pourvoi 10-27820 – voir lien en bas d’article) un arrêt d’une portée pratique considérable pour les bailleurs qui souhaitent demander une augmentation du loyer d’un local d’habitation à l’occasion du renouvellement du bail de celui-ci.

Les faits étaient les suivants : Une société civile immobilière (SCI), propriétaire d’un logement avait, le 29 septembre 2006, notifié à sa locataire une proposition de renouvellement moyennant un loyer réévalué à effet du 1er avril 2007.

La locataire n’ayant pas répondu à cette proposition, la SCI l’a assignée, le 16 mars 2007, en fixation du prix du bail renouvelé après avoir saisi la commission départementale de conciliation par courrier recommandé en date du 27 février 2007, reçu le 6 mars 2007, en réponse auquel la commission départementale de conciliation avait indiqué à la SCI, par courrier du 7 mars 2007, que le dossier n’était pas recevable, la commission devant être saisie plus de deux mois avant le terme du bail.

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence ayant déclaré la demande de la SCI irrecevable (on ignore ce qu’avait décidé le jugement de première instance), cette dernière s’est pourvue en cassation.

Dans l’arrêt du 7 mars 2012 rapporté la Cour de cassation approuve la cour d’appel :

d’avoir retenu que la saisine de la commission était un préalable obligatoire à la saisine du juge qui, elle-même, doit avoir lieu avant le terme du contrat et que la commission disposait d’un délai de deux mois pour donner son avis,

et d’avoir exactement déduit, de ces seuls motifs, en l’absence d’avis rendu par la commission, que la SCI, qui n’avait pas respecté ce délai, était irrecevable en sa demande de fixation du loyer du bail renouvelé.

Pour comprendre la portée de cette décision, on rappellera que, selon l’article 17 c) de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 2006, d’une part, en cas de désaccord du locataire sur le montant du loyer demandé par le bailleur dans son offre de renouvellement, ou à défaut de réponse du locataire quatre mois avant l’échéance du contrat (en l’espèce ce terme était au 30 novembre 2006) l’une ou l’autre des parties saisit la commission de conciliation instituée par l’article 20 de ladite loi et que, d’autre part, à défaut, d’accord constaté par la commission, le juge est saisi avant l’expiration du contrat.

L’article 20 précité dispose aussi que la commission doit rendre son avis dans les deux mois de sa saisine. A défaut, les parties peuvent saisir le juge.

Il résulte de la conjonction de ces textes que le juge (tribunal d’instance) ne peut être valablement saisi avant que la commission de conciliation n’ait donné son avis ou avant l’expiration du délai de deux mois imparti à cette commission pour donner ledit avis, mais qu’il doit impérativement être saisi avant l’expiration du bail.

En l’espèce, le bail expirait le 30 mars 2007, l’assignation devait donc être signifiée à la locataire (puis enrôlée au greffe) avant cette date, ce qui avait bien été fait le 16 mars 2007. Cette condition nécessaire était donc respectée.

Au regard des textes précité, et à la lecture de l’arrêt, cette condition n’est toutefois pas suffisante car il aurait fallu qu’à la date de délivrance de l’assignation la commission de conciliation ait rendu son avis ou bien ait été saisie depuis plus de deux mois. Une saisine de la commission par lettre du 27 février reçue le 6 mars ne permettait pas de remplir cette condition.

En pratique, pour disposer du temps nécessaire pour assigner avant l’échéance (il faut compter une quinzaine de jours) et réunir les conditions légales, la SCI aurait dû saisir la commission entre le 1er décembre 2006 et le 15 janvier 2007, de sorte que soit la commission aurait donné son avis avant le 15 mars, soit elle n’aurait pas été en mesure de le donner son avis avant cette date, mais dans les deux cas l’assignation délivrée avant le 30 mars 2007 aurait été régulière.

http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000025471930&fastReqId=1059597036&fastPos=1